mercredi 12 septembre 2012

Produit de la transformation de la cellule initiale et de l'activité de milliards de cellules usines, l'homme ne peut à aucun moment et d'aucune façon intervenir pour diriger leur travail. Il est leur résultat, non leur maître. Il les maltraite, les empoisonne, les asphyxie, les mutile. Elles font face, tant qu'elles peuvent. Quand la mort survient pour l'individu et pour elles, quand la matière vivante se défait et retourne aux éléments, une de ces cellules, ou deux, ou plusieurs parmi des milliards, s'est détachée de l'individu et a transmis la vie et les ordres. La forme de vie que lui et ses semblables sont chargés d'assurer continue. L'individu a servi à cela. Il a servi à maintenir, pour sa part infime, l'énorme courant qui entraîne, parmi tant d'autres, son espèce dans le temps et l'espace.
Né d'une goutte de vie qui porte des ordres, il doit porter plus loin l'une et les autres et faire, quand vient le moment, se détacher de lui des essaims de cellules messagères dont l'une ou deux ou plusieurs porteront plus loin que lui les ordres par lesquels il a vécu et qui lui survivront.
Déterminé par les constituants, emporté par ce qu'il constitue, impuissant à se diriger, ignorant de sa direction, l'être humain n'a qu'une apparence de vie autonome. Son existence individuelle est une supercherie.

La Faim du Tigre.

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